
En bref
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Date de création :
01 avril 2019 -
Date d'incubation :
Avril 2019 -
Fondateurs :
Marine Coré-Baillais -
Site internet :
https://bit.ly/patisserienumerique
La Pâtisserie Numérique, des desserts créatifs grâce à l’impression 3D
Quel est le concept de la Pâtisserie Numérique en quelques mots ?
Notre ambition est d’utiliser toutes les techniques de fabrication digitale pour réaliser des plats différemment. Plus largement, nous souhaitons créer un écosystème qui faciliterait l’invention de recettes créatives (notamment des desserts et gâteaux), grâce à la mise à disposition d’outils et services adaptés.
Comment est née l’idée de ce projet ?
Je travaille dans l’impression 3D depuis 2011. Je suis arrivée au début de la technologie et cela fait presque 10 ans que je réfléchis à créer les conditions économiques d’utilisation de cette technique. Je l’ai fait sur le marché des polymères - les plastiques, les résines et le métal – au sein de l’entreprise Sculpteo et j’ai eu l’opportunité de travailler pour des clients d’industries variées comme l’aéronautique, la défense, l’éducation, le médical ou encore le luxe… mais durant toutes ces années, je n’ai jamais réussi à développer un projet pour l’alimentaire car c’est un secteur assez complexe, avec de nombreuses normes. Je suis donc partie de Sculpteo en 2018, avec l’envie de créer des plats ou produits alimentaires à partir de l’impression 3D mais aussi de mes propres mains. J’ai passé mon CAP Pâtisserie, puis je suis devenue commis en restaurant afin de voir comment la technologie pouvait s’intégrer en cuisine. J’ai notamment travaillé au Meurice dans la brigade de Cédric Grolet et dans des pâtisseries parisiennes. C’est d’ailleurs au cours de mon CAP que j’ai postulé chez Smart Food Paris et que j’ai été sélectionnée.
Quel a été l’accompagnement de Smart Food Paris dans ton parcours ?
C’était pour moi très important d’être retenue chez Smart Food Paris car j’avais une très bonne expertise dans l’impression 3D mais aucune dans l’impression 3D appliquée à l’alimentaire. J’avais donc besoin de comprendre le fonctionnement de ce domaine, de confronter les technologies de l’impression 3D aux problématiques des acteurs du secteur, de me constituer un carnet d’adresses mais aussi de trouver des chimistes pour m’aider à la formulation. Mon incubation chez Smart Food Paris a ainsi joué son rôle à plein, cela a été super efficace pour répondre à tous ces besoins-là.
As-tu rencontré des difficultés particulières dans la mise en œuvre de ton projet ?
Oui, l’impression 3D alimentaire est beaucoup plus complexe que ce que j’imaginais. Je me suis donc entourée de chimistes et j’ai commencé à réfléchir à mon business model. Les équipes de Smart Food Paris m’ont beaucoup aidé là-dessus, notamment sur les cas d’application de l’impression 3D. Je suis intimement convaincue qu’une technologie pour une technologie ne sert à rien ; elle doit apporter une réelle valeur ajoutée au produit ou service, comme par exemple permettre de gagner du temps ou de faire des économies. C’est sur cette envie de proposer un avantage économique fort que nous avons focalisé notre R&D depuis fin août dernier. Nous avons développé un produit que nous appelons un « biscuit complexe », c’est-à-dire une forme imprimée en 3D qui permet de travailler le montage des gâteaux de manière différente. Nous travaillons également, en partenariat avec une université française, à la création d’un logiciel (le slicer) qui permet, aux personnes disposant d’une imprimante 3D alimentaire, d’imprimer des aliments à base de pâte selon une trajectoire continue. Aujourd’hui nous vendons ce logiciel seul, mais d’ici quelques semaines, nous allons lancer un kit dans lequel il y aura la pièce mécanique d’impression 3D, le logiciel et les poudres ou la pâte – selon le système utilisé. Et, à plus long terme, nous souhaiterions vendre d’un côté l’imprimante 3D alimentaire seule et de l’autre le logiciel de slicing.
Quelle est concrètement la valeur ajoutée de ton produit / service ?
Un des bénéfices est de permettre la création de formes qui sont aujourd’hui très difficiles à maîtriser à la main, comme par exemple la rosace de Notre-Dame que nous avons pu réaliser grâce à notre logiciel de slicing. Le recyclage est aussi une dimension importante dans notre projet. Notre produit permet de réaliser une impression 3D à partir de poudres, pâtes ou purées, et donc cela peut être un bon débouché pour les industriels de venir travailler des co-produits ou produits déclassés, et au niveau du foyer c’est une bonne façon de réutiliser ses chutes ou ses restes.
Comme tu accompagnes différents acteurs du secteur alimentaire, notamment des artisans pâtissiers, quelles sont selon toi les évolutions à venir ?
J’ai profité du confinement pour discuter avec de nombreux chefs pâtissiers ; c’est difficile de tirer une généralité mais j’ai l’impression, et peut être parce que j’y suis sensible, qu’il y a un mouvement de relocalisation et de naturalité qui est de plus en plus important. Si nous prenons l’exemple des personnes qui commandent des fraisiers ou des tartes aux framboises au mois de février, cela existe toujours mais cela énerve de plus en plus de professionnels du secteur. Et la crise sanitaire nous a d’ailleurs amenés à réfléchir davantage à cette dimension de responsabilité. Au-delà de la saisonnalité, il y également la responsabilité vis-à-vis des déchets qui commence à être importante aux yeux des chefs pâtissiers. Ce cheminement vers une plus grande durabilité est plus que salutaire !
Et quelle est ta vision de l’utilisation de l’impression 3D alimentaire à l’échelle industrielle ?
Contrairement aux chefs pâtissiers, je pense que les industriels ne sont pas encore prêts pour de l’impression 3D alimentaire. C’est peut-être un peu sévère de ma part de dire cela, mais l’industrie agroalimentaire a des cadences phénoménales alors que l’impression 3D est une technologie relativement lente et donc aujourd’hui son application semble difficile dans ce domaine. Elle peut cependant les aider dans leur démarche R&D !
Tu organises justement des conférences et ateliers pour les sensibiliser aux opportunités que peut offrir l’impression 3D ?
Oui et c’est d’ailleurs un des insights de l’équipe Smart Food Paris. Ils m’ont fait prendre conscience que mon expertise pouvait être monétisable et que pour avancer il était important de proposer de la formation et du conseil aux industriels sur le sujet de l’impression 3D.
Un des grands défis de l’impression 3D alimentaire serait donc de faciliter son application, son accès ?
Oui, il y a eu un engouement à ses débuts, elle était considérée comme une technologie très « hype », mais finalement aujourd’hui il y a très peu de personnes qui l’utilisent. Je pense que les conditions n’ont pas été réunies pour que cette technologie trouve sa place dans la société. Dans le secteur de l’impression 3D, nous avons toujours été convaincus de son utilité et, avec la crise sanitaire, nous avons connu un moment de grâce où, un peu partout dans le monde, les personnes disposant d’une imprimante 3D se sont mises à fabriquer gratuitement des masques et visières de protection pour les soignants. En France, des acteurs de l’impression 3D se sont coordonnés pour répondre au problème de pénurie et finalement ils ont constitué en quelques jours une véritable usine de production 100% décentralisée. Ils ont montré que l’impression 3D était une technologie résiliente, qu’une filière française existait et que nous pouvions arrêter les lignes de production en créant un réseau d’acteurs qui produisent localement, et ça c’est génial ! Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est structurer tout ce réseau dans le domaine alimentaire, créer une véritable communauté, référencer des fournisseurs et des outils pour bien organiser notre travail. Et c’est dans cela que je souhaite mettre toute mon énergie !
Quel serait ton portrait food ? Si tu étais un plat ? un ustensile ? une épice ?
Si j’étais un plat, je serais plutôt un dessert comme une forêt noire !
Si j’étais un ustensile je serais un couteau suisse.
Si j’étais une épice, je serais le sel, car j’aime l’idée d’être un exhausteur de goût, c’est parfait !
Quelle est ta recette fétiche ?
J’en ai tellement, c’est difficile de choisir ! En ce moment, je travaille beaucoup les tartes aux fraises et notamment celles avec une crème d’amandes, un confit de fraises et des fraises fraîches sur le dessus, donc un travail entre la fraîcheur et l’acidité du fruit, mais aussi entre les différentes textures, le moelleux de l’amande et le croustillant de la pâte sablée.
Et ton pêché mignon ?
La crème fraîche… je ne peux pas devenir vegan pour l’instant, c’est impossible !
Aurais-tu une pâtisserie à nous conseiller à Paris ?
Je vous recommande vivement un pâtissier exceptionnel dans le 14e arrondissement qui s’appelle Wonderland Pâtisserie, c’est de la haute pâtisserie accessible (208 Avenue du Maine). J’ai également une mention spéciale pour une pâtisserie dans laquelle j’ai travaillé qui s’appelle Chez Bogato dans le 14e (7 Rue Liancourt). Les desserts sont tellement beaux ! Ce sont des recettes de pâtisseries françaises avec une présentation visuelle originale et sophistiquée… du cake design à la française en somme !
Retrouvez toutes ces adresses sur la carte Mapstr de Smart Food Paris !