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Retour d'expérience de Gaëtan Gohin, cofondateur d’Algama et alumni Smart Food Paris

#Incubation #Startup #Bonnes Pratiques

Lundi 16 septembre, Smart Food Paris recevait Gaëtan Gohin, le cofondateur d’Algama — alumni Smart Food Paris — pour une session d’échange dans le cadre d’un atelier « retour d’expérience ».

Depuis 2013, Algama développe des ingrédients et lance avec succès des produits à base de microalgues tels que les sauces vegan The Good Spoon ou la boisson à base de spiruline Springwave. Une occasion unique pour les startups incubées de poser toutes leurs questions à l’entrepreneur : industrialisation, développement commercial, levée de fond… Gaëtan a partagé son expérience et sa vision du métier avec autant d’honnêteté que de générosité et nous profitons de cet article pour l’en remercier chaleureusement !

Voici un petit aperçu des grands enseignements de cet atelier.

INDUSTRIALISATION : CONSTRUIRE UNE RELATION DE CONFIANCE ET CAPITALISER SUR LES COMPÉTENCES DE CHACUN

Algama développe des ingrédients dérivés de microalgues et imagine des recettes à base de microalgues. Depuis 2017, leurs sauces Vegan The Good Spoon sont commercialisées en grande distribution, ce qui a impliqué d’en industrialiser la production. Cela pose de nombreuses questions techniques, réglementaires et organisationnelles : le fabricant a dû adapter le process de fabrication aux « nouveaux » ingrédients que sont les microalgues, acculturer les salariés en charge de la qualité et de la traçabilité. Autant de nouvelles responsabilités qu’Algama a dû contractualiser, sur des problématiques qui n’étaient pas dans leur cœur de compétence, telles que les assurances ou le droit de la propriété intellectuelle. Pour maîtriser cette montée à l’échelle, l’entreprise s’est entourée de consultants spécialisés, tout en construisant un lien fort entre ses propres ingénieurs, présents à chaque essai de production, et les équipes R&D du fabricant.

Capitaliser sur cette étape d’industrialisation en créant des opportunités de montée en compétence pour les deux parties prenantes ouvre des perspectives nouvelles. C’est le constat que fait Gaëtan : « Dans les faits, dès que leur équipe R&D reçoit une demande un peu inédite, elle nous la transfère ».

DÉVELOPPEMENT COMMERCIAL ET DISTRIBUTION : BIEN S'ENTOURER ET ANTICIPER LES BESOINS DES PARTENAIRES 

Pour une startup, ouvrir des canaux de distribution peut s’avérer complexe, tant les circuits sont structurés et les jeux d’acteurs complexes. Ici, les temporalités jouent un rôle important : les startups sont de nouvelles arrivantes dans des secteurs où les réseaux se sont consolidés au fil des années et des expériences. Plutôt qu’un frein à l’entrée, il faut y voir un levier insoupçonné : « Mon conseil, c’est de s’entourer. On est jeune et la distribution n’est pas notre spécialité. Et c’est normal ! Mais il y a des personnes qui ont fait ça pendant 20, parfois 30 ans. Et elles connaissent les rouages de ce milieu, finalement assez petit ». Dans cet esprit, Algama a été accompagné dans son développement commercial par un consultant spécialisé dans la négociation, qui maîtrisait parfaitement les habitudes du secteur et les mécanismes de définition des marges.

Disposer de ces personnes-ressources, en interne ou en externe, s’avère aussi précieux pour anticiper les intérêts des distributeurs à contractualiser avec des startups : il peut s’agir de trouver des marques en cohérence avec les promesses faites au consommateur, de s’affirmer comme une enseigne innovante… La connaissance des rouages du secteur permet aussi de s’y retrouver dans les négociations commerciales, grâce par exemple aux remises exceptionnelles ou aux programmes directs en magasins qui représentent de bons compromis dans le processus de définition des prix. Toutes ces ficelles du métier sont celles qui permettent de faire la différence avec d’autres marques et de construire des relations solides avec les distributeurs, qui peuvent déboucher sur des partenariats plus avancés : « les attentes évoluent petit à petit. Un distributeur peut rechercher du buzz pour aujourd’hui, mais du pipe pour demain et de la R&D pour après-demain. »

LEVÉES DE FONDS - "QUAND [UN INVESTISSEUR] RENCONTRE UNE BOITE, IL VEUT SAVOIR EN 7 MINUTES S'IL A ENVIE DE PARTIR 7 JOURS EN VACANCES AVEC L'EQUIPE"

Algama a déjà réalisé plusieurs levées de fonds, en 2013 – pour amorcer les premiers prototypes — en 2016 – avec une série seed de > 3,5 millions d’euros avec un fonds d’investissement de premier plan international… Entre ces deux dates, l’entreprise a connu une période délicate : « Les fonds nous disaient : “vous êtes intéressants, mais revenez quand vous aurez 2 ou 3 brevets, 500 k€ de chiffre d’affaires et que vous serez plus nombreux sur le marché” ». C’est un financement public qui a permis à Algama de monter à l’échelle. La BPI leur a accordé une aide à l’innovation qui a fait entrer de la trésorerie avec un levier non dilutif et leur a garanti de garder un bon cash burn, alors qu’à l’époque ils avaient des bureaux en France et aux États-Unis. 

Ces paramètres sont indispensables pour réaliser une levée de fond, mais sa réussite réside aussi dans la capacité à mettre en avant des KPI et milestones adaptés à sa proposition de valeur : « notre promesse lors de la seconde levée c’était : “jusqu’à maintenant, nous avons développé 10 prototypes. Et dans deux ans, nous aurons brevetés nos technologies et serons capables d’industrialiser” ». Ici, les données déterminantes n’étaient pas tant celles liées à la commercialisation — pas de promesse en chiffre d’affaires prévisionnel. Ce sont plutôt les différents audits technologiques réalisés par plusieurs cabinets indépendants distincts qui ont garanti le potentiel d’Algama.

Ils n’ont eu recours pour aucune de ces levées à un intermédiaire, du fait de la spécificité du secteur : « On s’est rendu compte que les thématiques food et agriculture intéressaient suffisamment les investisseurs et que l’on n’avait pas besoin de leveur de fond ». En revanche, un des fondateurs s’est mobilisé à temps complet sur le sujet, de manière à être réactif face aux questions des investisseurs potentiels. C’est aussi la meilleure manière d’anticiper et d’accélérer les rencontres pour prendre de l’avance dans la course à la levée, face à des startups qui pourraient proposer des produits similaires avec un meilleur time to market.

Et encore une fois, il s’agit de construire une relation de confiance avec les investisseurs, qu’ils soient Business Angels ou fonds d’investissement. Au-delà de l’enjeu commercial, Gaëtan a constaté qu’ils recherchent aussi et surtout des entrepreneurs avec qui ils peuvent construire des projets stimulants et qui les sortent de leur quotidien : « un jour un investisseur m’a dit : “quand je rencontre une boîte, au bout de 7 minutes il faut que je sache si je peux partir 7 jours en vacances avec l’équipe” ».  

UN FIL ROUGE : CONSTRUIRE SA TRIBU ET EN VALORISER LES EXPERTISES

S’il ne fallait retenir qu’une grande leçon de ce retour d’expérience, elle réside peut-être dans un terme qui est revenu à plusieurs reprises dans les réponses de Gaëtan : la tribu. Elle désigne avant tout l’équipe, qui peut être le meilleur porte-parole de l’entreprise… à condition, bien sûr, d’en connaître les orientations stratégiques ! Mais la tribu, c’est aussi toutes les relations de confiance construites pas à pas avec des business angels, des experts du secteur ou des partenaires, qui apportent leur écoute, leur connaissance du marché et leur regard critique sur l’évolution de l’entreprise.

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